Eric Naulleau
Président d'honneur du Festival Insolite 2018
La simple évocation du Graal, outre le plaisir renouvelé de dire ou d’entendre ce mot parmi les plus étranges de notre langue (trois rudes consonnes adoucies par la voyelle redoublée), fait toujours surgir la même vision autrefois reçue dans une salle obscure : « C’est la matière dont sont faits les rêves » laisse tomber Sam Spade à propos du faucon maltais, la statuette en or autour de laquelle s’affrontent les protagonistes du premier film de John Huston. Je suis donc particulièrement heureux et fier de présider la quatrième édition du film insolite de Rennes-le-Château où deux jours durant le Septième Art sera rebaptisé « Septième Graart ».
D’après mon expérience, car il existe presque autant de définitions que de quêteurs du Graal, ce mot désigne un ailleurs, un au-delà, une frontière extérieure ou intérieure dont il semble parfois qu’elle s’évanouit à mesure qu’on en approche, mais qui donne un sens (entendu dans la double acception de direction et de signification) à nos existences, même si d’aucuns se persuadent et tentent de nous persuader qu’il serait plus simple de barboter dans l’auge du pur matérialisme et de bannir toute forme de transcendance.
C’est dire que que le voyage ne mène pas nécessairement vers le récipient où aurait été recueilli le sang du christ sur la croix, mais dans mon cas personnel vers le surréalisme (André Breton et les autres verraient sans doute d’un mauvais œil que j’associe ce mouvement à une démarche spirituelle, je prends le risque), vers une scène où je suis monté en compagnie d’un artiste auquel je voue depuis quarante ans une admiration sans borne ou même vers le football, autre passion dont le symbole n’est pas sans évoquer la statuette du Faucon maltais — la fameuse coupe du monde.
Je vous souhaite non pas de trouver votre Graal, mais de commencer à le chercher.
Eric Naulleau